Et si ce n’était pas le poisson?

20 avril 2014

Et si ce n’était pas le poisson?

Au quPoissonartier Guet-Ndar, situé dans la Cité historique de Saint-Louis, à 272 kilomètres de Dakar, la pêche est la  principale activité qui donne un sens à l’existence humaine dans ce milieu. Chaque jour, une centaine d’équipages part à la recherche de bacs de poissons en haute mer. Dans cet endroit majoritairement habité par des pêcheurs, les habitants vivent essentiellement de ce que l’océan peut offrir.

Coincé entre la mer et le fleuve Sénégal, Guet-Ndar s’étend sur environ 900 mètres sur la ’langue de barbarie’’, dans la vieille ville de Saint-Louis, située à 260 Km au nord de Dakar. Bordé d’un côté par la rive incertaine du fleuve, de l’autre par l’impressionnant décor que constituent les concessions et d’autres maisons de fortune aménagées occasionnellement par les pêcheurs, cet atypique quartier présente un plan grossièrement orthogonal. A partir du pont Moustapha Malick Gaye, une belle vue panoramique permet d’apercevoir, un quartier populeux, dense et vivant, avec des ruelles si étroites qu’elles sont difficilement décelables sur une  photographie aérienne. Derrière les clôtures de tôles, de bois ou de parpaing, les maisons en dur sont aussi nombreuses que les baraques. Visiblement, toutes les constructions frappent par leur petite taille et entassement dans un espace réduit. Des maisons à étage, des habitations à l’architecture coloniale et les cours des concessions débordent fréquemment  sur la voie publique.

Dans ce vieux quartier des pêcheurs, des milliers de pirogues s’alignent tous les jours sur la plage entre le site de Diamalaye où on débarque la sardine et le cimetière « Thiaka Ndiaye » où l’on découvre des tombes  hérissées de piquets ou de fer, recouvertes de filets de pêche qui, à l’origine, « Etaient l’unique moyen de protéger les sépultures contre les chacals et les chiens errants », se remémore un vieillard  assis sur une natte, égrenant son gros chapelet. Des véhicules de transport commun filent vers le cimetière, transportant des familles qui vont à un enterrement. Sous des minuscules abris couverts de tôles et de roseaux, les cordonniers fabriquent des sandales, des gris-gris et autres amulettes qui « protègent les pêcheurs en haute mer ». En ce mois d’avril, période de nidification, le parc de la langue de Barbarie accueille de nombreux oiseaux migrateurs : les pélicans, les goélands railleurs, les cormorans, les et les hérons y viennent se poser les matinées et les soirées surtout.

De l’avenue Serviatus à la rue Cheikh Ahmadou Bamba dans le quartier Guet-Ndar,  on aperçoit d’un côté, des dizaines de pirogues alignées sur les cotes, prêtes à se lancer  en mer ; et puis de l’autre, des embarcations qui arrivent en groupes par intermittence. A l’intérieur, on peut voir entre autres des bidons, des pelles en bois, des sceaux plastiques, un petit moteur de marque « Yamaha enduro », des filets, des cordes  ainsi que des sacs d’emballages contenant divers produits marins notamment du poisson fraichement capturé. Aussitôt descendus, les pêcheurs sont accueillis par leurs collègues qui se précipitent pour leur venir au secours. Une foule  d’individus pousse l’embarcation, dressée sur des durs cylindres plastiques, mesurant 2 m de long.  « De retour de la mer, les pêcheurs amènent leurs poissons dans les chambres froides dans l’usine de glace pour les conserver. Au bout d’un certain temps, on les sort, puis les emballe dans des cartons et des sachets avant de les mettre sur des conteneurs de 40 pieds en destination de l’Europe pour être vendu », explique un frigoriste aux habits mouillés par des  morceaux de glace que l’on peut voir même sur les cils et les sourcils.

Aux abords de la rue Cheikh Ahmadou Bamba, une vingtaine de camions frigorifiques sont stationnés. Ils attendent d’être remplis de poissons qu’ils doivent acheminer dans les différents points de stocks de la ville. Non loin, des bacs de poissons et des tables servant à exposer les produits halieutiques longent toute la ruelle. Les charretiers, les vendeurs de Café-Touba et les passants se bousculent. Tout le monde est préoccupé. Chacun cherche à se frayer un chemin pour vaquer à ses occupations. Dans le petit marché, les causeries entre amis et les discussions entre vendeurs et acheteurs éclatent partout. Les touristes chinois et européens y débarquent en grand nombre. Apparemment, ils sont fascinés par les objets d’art soigneusement sculptés et achalandés sur le long du littoral.

Alors que certains poissons sont étalés sur les tables, d’autres sont exposés par terre, en tas, dans des conditions de salubrité très déplorables. Partout, une horde de mouches se pose sur les aliments qui dégagent une odeur  désagréable à respirer. « Donne 700 pour les deux », s’écrie un vendeur en train d’imbiber de l’au sur ses poissons peu charnus. A l’entrée du marché, un gros poisson  long d’un mettre, pesant environ 10 kilos, occupe toute la surface du panier dans lequel il est étalé. Il sert de vitrine et attire tous les clients mais personne ne l’achète à cause de son prix jugé « exorbitant », vendu à 25000 par son propriétaire. Chez les pêcheurs, les esprits ne sont pas tranquilles : L’heure est à l’émoi après l’annonce des mauvaises nouvelles météorologiques. Puis, on s’inquiète également du sort de certains de leurs collègues qui ont leurs embarcations arraisonnées par les gardes-côtes mauritaniens à Nouadhibou.

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